Mettre en sommeil les jambes sans repos

Envie de pédaler la nuit ? Que faire quand l’inconfort dans vos jambes ne vous laisse pas dormir ? Le syndrome des jambes sans repos (SJSR) n’est pas souvent bien identifié, ni pris au sérieux. Voici nos conseils pour remédier à ce calvaire.

Les 4 critères caractéristiques d’un SJSR

-Besoin irrépressible de bouger les jambes, associé à des sensations désagréables

-Symptômes présents uniquement au repos ou aggravés par le repos

-Symptômes améliorés par le mouvement

-Apparition ou aggravation des symptômes en fin de journée ou la nuit.

Il arrive très souvent que des mouvements involontaires dans les jambes pendant le sommeil accompagnent un SJSR


François Boissier de Sauvages fut un brillant esprit du siècle des Lumières. Ce médecin de la faculté de médecine de Montpellier a publié un ouvrage monumental énumérant 2400 maladies méthodiquement classées.

Ce travail est devenu une référence et certaines descriptions qu’il donne sont remarquables, comme celle de ce qu’il nomme avec beaucoup de pertinence « l’inquiétude des pieds » et qui correspond à ce qui sera appelé par la suite « les impatiences ou le syndrome des jambes sans repos (SJSR) », et depuis peu la maladie de Willis-Ekbom, du nom des neurologues qui l’ont identifiée.

Ce mal étrange n’apparaît que la nuit. Il n’est pas vraiment grave en soi, mais imaginez qu’une fois dans votre lit des centaines de fourmis rampent sur vos jambes, que des courants électriques parcourent vos membres avec en plus des douleurs ou des brûlures, et qu’au final vous soyez obligé de vous lever car le seul moyen de faire disparaître ces sensations pénibles, c’est de marcher.

Avec des jambes qui ne s’arrêtent jamais, le sommeil se fait rare et la fatigue augmente progressivement. Les conséquences sont innombrables : troubles de la concentration et de la mémoire, somnolence dans la journée, mais aussi augmentation du risque cardiovasculaire, dépression et anxiété, hyperactivité chez l’enfant.

C’est une véritable pathologie qui, dans sa forme sévère, fait vivre un calvaire. Mais pourquoi les jambes ne veulent-elles pas rester immobiles ?




LES DÉBATS SCIENTIFIQUES

Il semble que la maladie présente une composante héréditaire ou que parfois elle intervienne suite à un traumatisme ou une grossesse, ou encore qu’elle soit la conséquence d’une autre pathologie comme le diabète, l’insuffisance rénale, la fibromyalgie ou la sclérose en plaques. Mais dans la majorité des cas, l’origine n’est pas identifiée. Sur le plan physiologique, on sait que les troubles sont liés à un dysfonctionnement du système nerveux central dans la zone du cerveau qui contrôle l’activité motrice, et de nombreuses recherches cherchent à en élucider les causes.

À l’heure actuelle, deux facteurs déterminants ont été mis en évidence :

• Une carence en fer est le facteur de risque fondamental du SJSR et la correction du déficit améliore nettement, voire élimine complètement les symptômes.

Attention toutefois car le SJSR peut se manifester quand les réserves en fer sont basses mais néanmoins dans la normale sur une prise de sang ; c’est le cas pour 25 % des malades.

Pour comprendre cette situation, des chercheurs ont suggéré qu’il pourrait exister un manque de fer au niveau du cerveau malgré des réserves normales dans le sang. C’est ce que les études tendent à démontrer aujourd’hui, il y aurait ainsi une forte corrélation entre la diminution de la concentration en fer dans la substance noire, la principale région du cerveau qui produit de la dopamine, et la sévérité des symptômes du SJSR.

Le fer est en effet l’un des cofacteurs essentiels à la synthèse de la dopamine, le messager chimique grâce auquel les neurones communiquent.

• Une anomalie de la dopamine est effectivement attestée dans le SJSR et le Levodopa, un médicament précurseur de la dopamine, peut améliorer nettement les symptômes. Ce médicament est généralement
préconisé dans le traitement de la maladie de Parkinson où l’on assiste à une dégénérescence des neurones dopaminergiques. Dans le SJSR, des arguments solides laissent plutôt penser à un dysfonctionnement des récepteurs à la dopamine qui ne peuvent plus transmettre le signal aux autres cellules.

À noter que cette deuxième explication est en lien fort avec celle sur le fer puisqu’un manque de fer, même léger, peut faire dysfonctionner les neurones à dopamine.

COMMENT RETROUVER LA PAIX DES JAMBES

Le syndrome varie considérablement d’une personne à l’autre, il peut être intermittent et disparaître spontanément mais il s’aggrave souvent avec les années.

Les médicaments prescrits (dopaminergiques, épileptiques et benzodiazépines) ne peuvent pas guérir : leur but est de soulager les symptômes.

Mais ils ne fonctionnent pas toujours et finissent par perdre de leur efficacité à long terme.

Avant d’en arriver là, il existe des solutions à mettre en place. Il n’y en a pas une seule mais plusieurs car ce qui marche très bien chez l’un peut n’avoir aucun effet sur l’autre.

Première voie à explorer : vérifier systématiquement s’il existe une carence, même modeste, à laquelle il faudrait remédier, via une prise de sang :

• Le fer (mesure de la ferritine). Les chercheurs recommandent la supplémentation si votre taux sanguin de ferritine est inférieur à 50 ng/ml. Il faut aussi l’envisager pour un résultat « limite », soit 55 à 60. Pour une bonne absorption, le fer doit se prendre à jeun, à distance des repas.

• La vitamine B12.

• La vitamine D : la supplémentation est indiquée si le niveau dans le sang est inférieur à 75 nmol/l (soit 30 µg/l)14, à la dose de 4000 UI par jour.

Une petite étude suggère que le magnésium peut atténuer les symptômes, en particulier si vous êtes aussi victime de crampes musculaires et de spasmes dans les jambes.

Dosage recommandé : 300 à 400 mg de magnésium par jour, répartis au long de la journée et pris au cours du repas.

Deuxième point : modifier les habitudes qui aggravent le problème et adopter une bonne hygiène de vie.

• Éviter ou supprimer l’alcool, en particulier le soir, qui augmente la durée et l’intensité des sensations désagréables. Même chose pour les excitants comme le café et les colas qui doivent être proscrits en fin de journée pour ne pas perturber le sommeil.

• Arrêter de fumer. Le conseil peut sembler rébarbatif mais il existe des cas rapportés dans la littérature scientifique dans lesquels le simple fait d’arrêter de fumer a permis de faire disparaître totalement et durablement le syndrome des jambes sans repos.

• Faire de l’exercice physique est sans conteste une des meilleures options pour vous sentir mieux. Pratiquer par exemple une activité physique modérée avec des exercices d’étirement des jambes trois fois par semaine améliore en trois mois de 50 % la sévérité des symptômes.

Ou du yoga qui en huit semaines réduit les sensations pénibles dans les jambes, mais améliore aussi le niveau de stress et favorise un sommeil réparateur.

Par contre, un exercice trop intense et pratiqué trop tard en soirée les aggrave.

• Mettre en place une bonne hygiène du sommeil, comme par exemple se lever et se coucher à des heures régulières, dormir dans le noir, au calme et dans une chambre fraîche, limiter l’utilisation des écrans (tablette, télévision, etc.) deux à trois heures avant le coucher, éviter le stress et prendre le temps
de se relaxer (méditation, bain tiède, etc.).

• Non seulement un massage favorise la détente et le sommeil, mais il agit aussi favorablement sur les symptômes des jambes et améliore la circulation sanguine. Sur trois semaines, un massage de 45 minutes réalisé sur les jambes deux fois par semaine a permis ainsi d’éliminer les symptômes. Mieux encore, l’effet a persisté deux semaines après l’arrêt des massages.

Deux causes méconnues du syndrome des jambes sans repos

Est-ce dû à un mauvais fonctionnement du système veineux ?

Une insuffisance veineuse peut se traduire par des jambes lourdes et des sensations désagréables qui s’exacerbent en fin de journée.

Mais au contraire du SJSR, ces sensations sont soulagées au repos en s’allongeant.

Pourtant, si vous souffrez d’une insuffisance veineuse et du SJSR, vous auriez tout intérêt à traiter les varices, une étude ayant noté qu’une sclérose des veines abîmées avait permis d’améliorer le syndrome dans 98 % des cas.

Aïe, et si c’était les intestins ?

69 % des personnes atteintes d’un SJSR présentent aussi une prolifération bactérienne anormale dans
l’intestin grêle et 28 % un syndrome du côlon irritable.

Mieux encore, quelques études ont trouvé que les symptômes des jambes sans repos s’amélioraient une fois que le problème intestinal était traité.

Il faut en déduire que si vous avez la malchance de souffrir à la fois du SJSR et d’un côlon irritable, votre priorité devrait être de résoudre le problème intestinal.

Sources

ABE n°138 Mars 2018

Merci à  Annie Casamayou pour ces précieux conseils

Sources scientifiques

1. Xiong L, Montplaisir J, Desautels A, et al. Family study of restless legs syndrome in Quebec, Canada: clinical characterization of 671 familial cases. Arch Neurol. 2010 May;67(5):617-22 2. Neau, J. P., Porcheron, A., Mathis, S., Julian, A., Meurice, J. C., Paquereau, J., et al. (2010). Restless legs syndrome and pregnancy: a questionnaire study in the Poitiers District, France. Eur. Neurol. 64, 268–274. doi: 10.1159/000321413 3. Ohayon, M. M., O’hara, R., and Vitiello, M. V. (2012). Epidemiology of restless legs syndrome: a synthesis of the literature. Sleep Med. Rev. 16, 283–295. doi: 10.1016/j.smrv.2011.05.002 4. Allen RP, Auerbach S, Bahrain H, Auerbach M, Earley CJ The prevalence and impact of restless legs syndrome on patients with iron deficiency anemia. Am J Hematol. 2013 Apr; 88(4):261-4 5. Rangarajan S and D’souza GA. Restless legs syndrome in Indian patients having iron deficiency anemia in a tertiary care hospital. Sleep Med. 2007 Apr;8(3):247-51 6. Mizuno S, Mihara T, Miyaoka T, Inagaki T, Horiguchi J J CSF iron, ferritin and transferrin levels in restless legs syndrome. Sleep Res. 2005 Mar; 14(1):43-7 7. Winkelman JW, Johnston L Augmentation and tolerance with long-term pramipexole treatment of restless legs syndrome (RLS). Sleep Med. 2004 Jan; 5(1):9-14 8. Earley CJ, Kuwabara H, Wong DF, Gamaldo C, Salas R, Brasic J, Ravert HT, Dannals RF, Allen RP The dopamine transporter is decreased in the striatum of subjects with restless legs syndrome. Sleep. 2011 Mar 1; 34(3):341-7 9. Hayes CA, Kingsley JR, Hamby KR, Carlow J.The effect of endovenous laser ablation on restless legs syndrome. Phlebology. 2008;23(3):112-7. doi: 10.1258/phleb.2007.007051 10. Weinstock LB, Walters AS. Restless legs syndrome is associated with irritable bowel syndrome and small intestinal bacterial overgrowth. Sleep Med. 2011 Jun;12(6):610-3. doi: 10.1016/j.sleep.2011.03.007. Epub 2011 May 13 11. Leonard B WEINSTOCK,
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